Vent de révolte chez les juges après l'affaire Juppé
Le monde judiciaire a infligé un revers à l'Elysée en invalidant de facto la mission administrative voulue par Jacques Chirac pour enquêter sur les pressions qu'auraient subies les magistrats qui ont condamné Alain Juppé la semaine dernière.
Convoqués jeudi soir devant cette mission, la présidente du tribunal de Nanterre, Catherine Pierce, et ses deux assesseurs, Alain Prache et Fabienne Schaller, ont refusé de témoigner, a-t-on appris vendredi de sources concordantes.
Ils ont expliqué qu'ils souhaitaient réserver leurs dépositions aux juges d'instruction saisis de l'affaire et éventuellement au Conseil supérieur de la magistrature (CSM), institution indépendante tenue à l'écart de l'enquête.
Ce refus intervient après une protestation officielle adressée jeudi par le CSM à l'Elysée, une véritable "première" dans les relations entre les deux institutions.
Le CSM a rappelé qu'il lui revenait "d'assister le président de la République dans son rôle de garant de l'indépendance de l'autorité judiciaire" et a "regretté de ne pas avoir été consulté avant la création d'une commission administrative chargée d'enquêter sur les faits".
L'imbroglio a suscité un certain embarras au gouvernement et dans la "commission Chirac", où siègent Renaud Denoix de Saint Marc, vice-président du Conseil d'Etat, François Logerot, président de la Cour des comptes, et Guy Canivet, président de la Cour de cassation.
Interrogé par Reuters sur le sort de la commission, une source proche du gouvernement a répondu : "On ne sait pas, il faut s'adresser à l'Elysée". Le cabinet de Guy Canivet n'a pas souhaiter s'exprimer sur la question.
Apparaît en outre le problème procédural que pourrait créer la présence dans cette commission du président de la Cour de cassation, car celui-ci pourrait être amené plus tard à juger l'affaire des emplois fictifs du RPR en cas de pourvoi en cassation.
suite de l'articleles juges ont décidé de ne pas se laisser faire