Le Conseil des ministres européens a rejeté hier à Bruxelles certains des principes fondamentaux du règlement REACH sur les produits chimiques. Pour les organisations de protection de l’environnement, de défense des femmes, de la santé et des consommateurs*, il s’agit d’un véritable échec. Les ministres européens n’ont, en effet, pas su saisir l'opportunité exceptionnelle de protéger les populations et l'environnement de la menace des produits chimiques toxiques.
Les Etats membres de l’Europe ont refusé le principe fondamental de substitution adopté le mois dernier par le Parlement Européen, c’est à dire, l'obligation de remplacer les produits chimiques dangereux par des alternatives plus saines à chaque fois que cela est possible. Bien que les industriels seront obligés "d’envisager" des substituts pour chaque produit chimique dangereux, les décisionnaires devront quand même les autoriser après un ''contrôle adéquat'', même si des alternatives plus saines sont disponibles.
Cette échappatoire n’apporte aucun changement par rapport au système actuel défectueux qui n'a pas réussi à contrôler les produits les plus dangereux et qui a freiné l'entrée sur le marché des produits sains et innovants.
De plus, si le Conseil a renforcé les conditions de substitution pour les produits chimiques ''persistants'' et ''bioaccumulatifs'' qui ne représentent qu'une petite partie de tous les produits chimiques dangereux, il a laissé libre cours aux carcinogènes, hautement toxiques pour la reproduction (par exemple le phtalate DEHP) et aux substances altérant les hormones (par exemple le bisphénol A), même si des alternatives plus sûres existent.
Le Conseil a également voté la réduction significative des données de sécurité que les producteurs ont obligation de fournir, en particulier concernant les substances produites en faible quantité. Des milliers de produits chimiques pourraient donc rester sur le marché, malgré l'absence d'informations sanitaires, ce qui réduit également les possibilités d'identifier des alternatives plus sûres. Des scandales, comme la récente contamination en Europe du lait pour bébés par un produit chimique potentiellement dangereux, se reproduiront aussi longtemps qu’il y aura un manque de données sanitaires.
Il est essentiel que le Parlement réaffirme son soutien à la substitution obligatoire en seconde lecture l'année prochaine. Ceci garantirait, entres autres avantages générés par REACH, une économie des coûts de traitement des principales maladies professionnelles dues à la contamination chimique de près de 90 milliards d'euros sur 30 ans.
Après 4 ans années de dilution de REACH sous la pression de l'industrie chimique, mettre en pratique une forte obligation de substitution est la meilleure et dernière opportunité pour enrayer la contamination chimique toxique croissante et pour assurer la protection de la santé humaine et l'environnement.
